Saint Gilles du Gard

Basilique Saint Gilles

 

Saint-Gilles et le Liber Sancti Jacobi 

"Il faut aussi rendre visite avec des égards très attentifs au corps vénérable de saint Gilles, pieux confesseur et abbé, car saint Gilles, célèbre dans tous les pays du monde , doit être vénéré par tous, dignement honoré par tous et par tous aimé, invoqué et supplié. Après les prophètes et les aptres, nul parmi les bienheureux n'est plus digne que lui, nul n'est plus saint, revêtu de gloire, nul n'est plus prompt à venir en aide. En effet, c'est lui qui avant tous les autres saints a coutume de venir le plus vite au secours des malheureux , des affligés et des angoissés qui l'invoquent. O comme il est beau et profitable de visiter son tombeau ! Le jour même où....... ".

Ce court extrait emprunté de la traduction française du Codex vous le montre bien : Saint Gilles est un lieu de passage obligé de la VIA TOLOSANA. Court extrait, car il y a 5 pages consacrées à Saint Gilles, ce qui en fait le site le plus détaillé après celles consacrées à Saint-Jacques-de-Compostelle.

Et le classement au patrimoine mondial de l'humanité de la façade de l'ancienne abbatiale de Saint Gilles, accentue cette obligation. 

Mais revenons au texte du Liber sancti Jacobi :
Après cette introduction, c'est une liste de miracles attribués à saint Gilles, puis une évocation de sa vie spirituelle, la longue description minutieuse et détaillée d'une châsse d'or (aujourd'hui disparue ) qui renfermerait les reliques de saint Gilles , puis pour finir, quelques malédictions à l'égard de ceux qui prétendent posséder eux aussi le corps de saint Gilles.

 

Saint Gilles : la ville


abbaye de Saint-Gilles

La ville de Saint-Gilles a une histoire intimement liée à celle de son abbaye.

Et pourtant, l'implantation humaine dans les environs est beaucoup plus ancienne et date sans doute de la préhistoire, de la haute antiquité.

Les fouilles archéologiques ont permis de démontrer la présence de latifundiums romaines( grandes propriétés agricoles à culture extensive)  par de nombreuses découvertes archéologiques.

Entre les Vè et le IXème siècle, il y eut les invasions des Goths et des Sarrasins


armoiries de Saint-Gilles-du-Gard
A la fin du VIIème siècle, l'ermite Gilles y fonde un monastère bénédictin et il y sera inhumé. Ce sera le début du développement d'un pèlerinage vers son tombeau.

Il sera accompagné par la construction d'une nouvelle abbaye et de  l'agrandissement de l'église. La petite ville devient plaque tournante de pèlerinages, avec la vénération locale, mais aussi, parce que ville portuaire, elle devient une étape importante et incontournable pour les pèlerinages vers ROME et JERUSALEM.

Placée sous la protection des Comtes de Toulouse , le rayonnement de la cité se développe.

En 1101, les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem et en 1135, les templiers fondent un établissement à Saint-Gilles ,

Point de départ des croisades en Terre sainte, la ville s'enrichira et se développera.

Plusieurs faits vont contrarier son développement :

- en occitanie, pays de tolérance et de liberté, se développe un courant religieux parallèle à la ligne traditionnelle : le catharisme. 

Pour beaucoup, cette tolérance est inacceptable, et veulent punir par une guerre le comté de Toulouse. Il faudra trouver un prétexte. En janvier 1208, Pierre de Castelnau, légat du pape sera assassiné près de Saint-Gilles. Et ce fait sera l'alibi idéal du pape qui vainement recherchait à déclencher une croisade. 

Bref ce sera la Croisade des Albigeois et son cortège de malheurs , de morts, de feux, de sang. Et cette guerre aura pour effet immédiat, le déclin du pèlerinage vers Saint-gilles.

- Dès la fin du XIIe siècle, le port et le commerce de Saint-Gilles sont concurrencés par les villes d'Aigues-Mortes et de Beaucaire , cela explique le début de son déclin.

 

- les guerres de religion : ces guerres déclenchées dans le nord de la France pour des conflits de pouvoir vont se traduire dans le Sud par la destruction de nombreux patrimoines. Il faut rappeler que la Réforme s'implanta fortement dans le sud ( Cévennes, Béarn, Ariège etc ..)  et qu'aux assassinats perpétrés dans le Nord, succédèrent  des destructions de tout symbole catholique dans le Sud.

Saint-Gilles n'échappa à la règle, la Réforme s'y implanta, et le patrimoine architectural en souffrit fortement puisque l'Abbaye fut détruite, et la façade aujourd'hui classée nous présente des statues endommagées.

La révolution apporta son lot de destruction dans une cité qui avait perdu son dynamisme médieval.

 

Pendant que se développe dans la région une activité agricole basée sur l'arboriculture, la viticulture et les rizières de Camargue,  la ville redécouvre un développement touristique de part sa situation de Porte de Camargue, mais surtout depuis le classement de la façade de son Abbaye au Patrimoine Mondial de L'Humanité. 

De nombreux touristes viennent y admirer sa richesse iconographique , la beauté de son immense crypte, l'escalier à vis et se promener dans ses ruelles ensoleillées et le long de son port.

 

 

mais qui était Saint Gilles 

 

Dans le Liber Sancti jacobi, nous lisons " cette très brillante étoile venue de Grèce .." . La légende attribue la naissance de saint Gilles ( ou Aegidius ) à Athènes. Il aurait vécu entre le VI et le IX ème siècle,  et serait  un contemporain de saint Césaire d'Arles et de Charlemagne, lesquels n'ont pas vécu ensemble.

Quittant Athènes après avoir distribué ses biens ( il serait né fils d'une illustre famille  riche) , il vint à Arles , puis se retire quelques temps dans les gorges du Gardon, où se trouvait l'ermite St Vérédème. 

Plus tard, on le retrouve à Orléans, Rome,  NURIA (en catalogne) , où il sculptera une vierge pour les bergers, et où par la suite son culte se développera.

Il se retire ensuite dans une forêt au sud de Nîmes, où il vivra en ermite. 

L'histoire veut qu'il sympathise, qu'il apprivoise une petite biche qui désormais le nourrirait de son lait. Lors d'une campagne de chasse du roi Wisigoth Wamba la légende veut que, poursuivie par la meute du roi, elle se réfugie auprès du saint ermite et ce fut notre cher ermite qui fut blessé par la flèche du roi.

 

Le roi gêné et ému lui offrira la vallée Falvienne pour y bâtir un monastère, et c'est ainsi que Saint Gilles deviendra le 1er abbé du nouveau monastère .Il sera placé sous l'autorité de Rome, sera dédié à Saint-pierre et Saint-Paul, et c'est autour de ce monastère que se développera la ville actuelle.

Il y mourra septembre 720 ou 721. Son tombeau sera placé dans le monastère. La réputation de ses miracles entraînera le développement d'un culte, et une multitude de pèlerins viendront à Saint Gilles pour le vénérer.

Ses miracles :
Une des sources de leur  connaissance est le Liber miraculorum sancti Egidii, compilé entre 1121 et 1172.
On peut entre autres citer :
- protection d'un cordonnier avant l'écroulement de sa maison
- guérison d'un malade qui revêt la tenue du saint
- un homme piqué par un serpent est guéri
- un autre possédé du démon est délivré
- une tempête sur mer est apaisée
- une biche est apprivoisée et le sert
- le péché de Charlemagne lui est révélé par un ange
- un roi est rendu à la vie
- un estropié retrouve la santé
- 2 portes sculptées à Rome jusqu'au port du Rhne ..
 

Le développement du pelerinage de Saint Gilles :

Au moyen Age :

La vénération locale de saint Gilles va bientôt dépasser les frontières. L'activité portuaire de la ville y est pour quelque chose. C'est d'ici que partent les pèlerins pour ROME et JERUSALEM et où qu'ils se trouvent , ils parlent de leur saint.

Bientôt toute l' Europe médiévale connaîtra saint Gilles, et on y viendra de tout horizon. L'Europe entière se recueillera sur le tombeau du Saint qui multipliait les miracles.

Et les pèlerins exaucés dans leurs requêtes propagent alors le nom "du doux Saint à la biche", invoqué en particulier contre les maladies nerveuses, la peur , l'angoisse...

De nos jours , des milliers d'églises, de chapelles lui sont dédiées dans toute l' Europe, la France, bien sr, mais aussi Allemagne, Autriche, Belgique, Grande-Bretagne, Danemark, Islande, Pologne, Hongrie, Tchécoslovaquie .....

 

Le pélerinage de saint Jacques :

Avec le développement du pèlerinage de saint Jacques, saint Gilles, accentue son rôle de plaque tournante des pèlerinages.  Et tous ceux qui viennent de Provence, Italie, et passent par Arles pour aller à Compostelle par la VIA TOLOSANA , font étape à Saint Gilles. La vénération de Saint Gilles ( d'autant plus qu'il s'agit d'un des lieux les plus importants de cette époque médiévale) y est obligée, nos pèlerins allant vénérer sur leur chemin les sanctuaires régionaux.

Et cela explique aussi que le Liber sancti Jacobi présente sur Saint gilles, des pages importantes dont on dit qu'elles seraient inspirées de la Vita sancti Egidij, et lui consacre un des plus longs chapitre , des plus enthousiastes, des plus riches en renseignements précis et détaillés : l'auteur résume à grands traits "la Vita Sancti Egidii" écrite à la fin du Xème siècle, la merveilleuse vie de saint Gilles.

De nos jours: Le renouveau du pèlerinage

Le 29 août 1865, grâce à l'obstination d'un curé, le tombeau de saint Gilles est redécouvert. Un siècle plus tard, un groupe de passionnés de saint Gilles  avec quelques marcheurs et l'appui de Mgr Rougé relancent  le pèlerinage. Depuis, des centaines de pèlerins se sont remis en marche vers Saint-Gilles. 

Chaque année, fin août, ils sont accueillis aux portes de la ville par les Saint-Gillois et l'evêque de Nîmes. En 1983, devant l'ampleur qu'a pris ce pèlerinage, Monseigneur Jean Cadilhac, evêque de Nîmes, décide la création de l'association des "chemins de Saint Gilles", lui confiant la mission d'organiser le pèlerinage actuel. "Rupture, Intériorité, Fraternité" en seront les maîtres-mots.

Les marches pèlerines sont appelées Routes. Chacune de celles-ci est constituée d'un groupe de 15 à 20 personnes, dure de 1 à 3 semaines et converge vers le but du pèlerinage : Saint-Gilles-du-Gard.

Epoque et durée des routes :
- à Pâques : 2 ou 3 routes à des dates différentes autour de la Fête. (Durée : une semaine.)
- en juillet : 1 ou 2 routes à des dates différentes. (Durée : 2 semaines.)
- en aot : 4-5-6 routes qui arrivent ensemble à Saint-Gilles, fin aot, lors de la fête votive de saint Gilles.(Durée : 2 semaines. )
Se renseigner en consultant le site qui lui est dédié: www.cheminstgilles.org

le renouveau du pélerinage de Saint jacques de Compostelle :

Depuis une trentaine d'année, ce pélerinage s'est relancé. Chaque année, ils sont plusieurs centaines à démarrer d'ARLES pour cheminer sur la VIA TOLOSANA. Saint-Gilles-du-Gard est leur première étape. aussi ne soyez pas étonné de voir tous ces jacquets visiter l'abbaye de Saint-Gilles.


Ceux qui désirent approfondir la vie de saint Gilles le feront par la consultation d'ouvrages consacrés à saint Gilles et à son pèlerinage. Parmi ces ouvrages, nous noterons:

GUILLAUME de BERNEVILLE la Vie de saint Gilles . texte du XIIème siècle, publié d'après le manuscrit de la bibliothèque Laurentienne de Florence. Edition bilingue traduite, présentée par Fran?se Laurent.
Edition Champion 2003 CCMA 6  1 volume LXIV - 316 pages
référence br 2-7453-0702-9  10 Euros 
( voir catalogue Moyen Age.pdf sur le site des éditions champion www.honorechampion.com

 

Marcel Girault.
- La Vie de saint Gilles. Préface de Régine Pernoud. Lacour, Nîmes, 1987, 176 p.
- Les Chemins de Saint-Gilles. Préface de Raymond Oursel. Lacour, Nîmes, 1990.
- Le Chemin de Regordane, ancienne route d'Alès au Puy (l'historique). Préface de Jean Pellet. Lacour, Nîmes. 1988.
- Le Chemin de Regordane. Guide à l'usage des pèlerins de Saint-Gilles des Regourdiers et autres marcheurs, du Puy-en-Velay à Saint-Gilles du Gard.

Ces ouvrages, introuvables en librairie sauf dans le Gard, sont disponibles chez lauteur (courriel: marcelgirault@yahoo.fr)

Marcel et Pierre-Gilles Girault:
- Visages de pèlerins au Moyen Age. Les pèlerinages européens dans l'art et l'épopée. Zodiaque, 2001. 280 p, 158 photos.
- Le livre des miracles de saint Gilles. Paradigme, 2007.

 

Manuscrits Valenciennes Notice ms 0513 sur http://www.valenciennes.fr/bib/fondsvirtuels/microfilms/Notices%20Molinier/notice0513.asp
Fol 123 v . " Prologus in vita sancti Egidii.... Sanctorum quidem ac propensiori cultu...

l' Abbaye de Saint Gilles


une vue de l'Abbaye et son cloître
Dès le début, le monastère sera affilié à Cluny (1066). Mais ses rapports avec l'abbaye-mère furent difficiles.
En 1098, le pape confirme à la fois l'indépendance relative du monastère (droit d'élire son abbé) et son union à Cluny .

Avec le développement du pélerinage, l'église dédiée à Saint-pierre et à Saint-Paul ,du monastère primitif s'avère trop petite.

En 1116, les moines entreprennent de construire un nouvel édifice, au-dessus de l'église primitive qu'on appelle improprement crypte aujourd'hui et où reposera le corps du saint .

Elle sera plus vaste, de 98 mètres de long, large de 25 m, avec un déambulatoire et 3 nefs. La nef centrale arrivait jusqu'au choeur semi-circulaire et les nefs latérales aboutissaient à un déambulatoire flanqué de cinq chapelles rayonnantes et deux chapelles latérales orientées.

 

En 1226, l'abbaye est soumise au roi de France. Sécularisée en 1538, elle est transformée par le pape Paul III en collégiale.

L'édifice fut partiellement détruit lors des Guerres de Religion (1562-1622), seule la moitié de l'église sera restaurée dans un style néo-gothique (église haute actuelle les moyens financiers nécessaires manquant). (vers 1650). Les votes seront largement rabaissées (18m au lieu de 25m pour la nef centrale) .

La nef centrale , longue à présent de 50m, sera dotée d'un chevet polygonal.

Actuellement, seul les piliers, les chapiteaux et la travée abritant l'actuelle sacristie sont d'époque romane.

Le façade sera restaurée de 1842 à 1868. 

De très belles orgues seront construites par Boisselin en 1659 (restaurées en 1704 et 1808). 


le porche d'entrée central de l'Eglise
ancien choeur

 

Au centre du choeur, se trouve le buste de Clément IV, natif de Saint-Gilles devenu Pape à Rome de 1265 à 1268.

On peut encore y remarquer les pieds des anciennes colonnes, et sur l'extérieur du batiment de l'escalier à vis, une partie d'un occulus ainsi que le départ d'arc ogival.

 Dans le déambulatoire s'ordonnent des sarcophages gallo-romains portant des cartouches avec des inscriptions entourées de motifs décoratifs tels que des amours ailés ou des guirlandes de fruits.


descente à l'église basse ou crypte
L'église basse ou crypte, est celle qui correspond à l'église primitive. Elle fut remaniée  aux XIe et XIIe siècles et abrite le sarcophage de Saint Gilles, redécouvert en 1865 par l'Abbé Goubler, et portant l'inscription : IN HTML QI C B AEGD (dans ce tombeau repose le corps du bienheureux AEGIDIUS). 

Sur la vote  qui surplombe le tombeau on devine des traces de fresques, malheureusement très effacées. 


Escalier à vis

A l'arrière de l'abbaye, sur les lieux de l'ancien choeur détruit, se dresse l'escalier à vis, considéré comme un chef d'oeuvre majeur des compagnons tailleurs de pierre.

Cet escalier hélicoïdal est d'une pureté architectonique datant du XIIème siècle. Cet ensemble devint vite  une oeuvre que venaient voir les tailleurs de pierre, qui y gravinrent leurs noms et devises lors de leurs visites.

L'escalier desservait le clocher nord de l'abbatiale, la taille et l'assemblage de ses 50 marches sont exceptionnelles

 

plan de l'église basse

plan de l'église basse ou crypte ( d'après panneau présenté sur place)

la façade romane principale


le portail roman de la basilique Saint Gilles du Gard

 

détail du tympan et de la frise du portail central

 

La façade de l'Abbatiale a été classée au Patrimoine Mondial de l'Humanité par l'UNESCO le 2/12/1998 à Tokyo au titre d'Etape sur les Chemins de Compostelle. Elle est considérée comme un des fleurons des sculptures romane du Sud de la France et date du XIIème siècle.

3 portails avec pîlastres et portiques occupant toute la largeur.  La partie supérieure a été démolie lors de l'abaissement de l'édifice, lors de la restauration de 1650. Les statues ont été mutilées lors des guerres de religion et sous la Révolution.


Cette façade a été élevée en plusieurs étapes et plusieurs sculpteurs y travaillèrent, dont le fameux Brunus qui signa les statues de Saint Matthieu et de Saint Barthélémy.
Les sculptures qui constituent la frise sont tirées des Evangiles et de la Bible. Les tympans représentent l'Adoration des mages, le Christ en majesté et la Crucifixion.

 

 

saint Gilles

 

 

SAINT-GILLES, un site majeur de la VIA TOLOSANA.  Important lieu de pélerinage en lui-même , Saint-Gilles-du-GARD fut plaque-tournante des pèlerinages chrétiens  médiévaux. 

C'est ici que de nombreux pèlerins venaient vénérer Saint Gilles , c'est ici que passèrent une multitude d'autres s'embarquant vers ROME ou vers JERUSALEM, c'est ici que passent ,ceux qui d'ARLES , vont sur notre VIA TOLOSANA  vers Compostelle.

Vous visiterez ce haut lieu de vénération, regrettant que par leur  bétise , les hommes aient détruit et mutilé une oeuvre patrimoniale de haute valeur.